Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a souligné l’utilité de l’assurance-vie, appréhendée comme un placement à long terme.


Voilà une sacrée reconnaissance. Récemment, la Cour de cassation a jugé que l’assurance-vie était un placement « utile ». La plus haute juridiction française avait à se prononcer sur le cas d’un monsieur qui avait souscrit en 1999, à l’âge de 73 ans, deux contrats d’assurance vie auprès de deux assureurs différents. Il y avait versé 166.622,68 euros dans l’un et 100.770,58 euros dans l’autre. Ces fonds provenaient de ventes d’immeubles.

Au décès du souscripteur intervenu en 2007, sa veuve perçoit la totalité des capitaux des deux contrats d’assurance vie. Les sept enfants du défunt, issus d’une première union, contestent le bénéfice. Pour eux, l’opération vise à les déshériter en partie. L’assurance-vie étant considérée comme étant hors succession, les deux contrats souscrits par leur père décédé n’ont en effet pas été intégrés à l’actif successoral.

Primes « manifestement exagérées »

Du coup, les capitaux perçus par leur belle-mère n’ont pas été soumis aux règles successorales en vigueur en France. Celles-ci prévoient notamment que la moitié de la fortune d’un défunt est réservée à ses héritiers directs (c’est-à-dire ses descendants) en présence d’un enfant, les deux-tiers en présence de deux enfants et les trois-quarts en présence de trois enfants et plus. C’est ce que l’on appelle « la réserve héréditaire ». Or, pour les sept frères et sœurs, les immeubles vendus constituaient le gros du patrimoine de leur père décédé.

Afin d’avoir gain de cause, les enfants contestataires ont estimé que les 267.393,26 euros cumulés sur les deux assurances vie constituaient des primes « manifestement exagérées ». En d’autres termes que cette somme, issue des cessions immobilières, était disproportionnée par rapport aux revenus du souscripteur décédé. Si tel est le cas, la justice réintègre les fonds dans l’actif successoral car elle y voit un moyen de contourner la réserve héréditaire et de réduire les droits successoraux.

Comportement de bon aloi

Dans un arrêt paru le 9 février 2017, la cour d’appel de Bourges a retoqué l’argument. Les juges ont en effet estimé que le souscripteur décédé percevait de son vivant un bon niveau de retraite qui lui permettait de largement couvrir ses dépenses courantes et de lui assurer un niveau de vie tout à fait satisfaisant. Ils notent, par ailleurs, que si le défunt était âgé lorsqu’il a ouvert les deux contrats d’assurance vie, il s’est avéré qu’il était totalement sain de corps et d’esprit au moment de leur souscription. Enfin, contrairement aux allégations des enfants, les immeubles vendus ne constituaient pas l’intégralité du patrimoine du défunt.

Face au rejet de la cour d’appel, les ayants droit directs se pourvoient en cassation. Dans un arrêt rendu le 15 mai 2018, la première chambre civile de la Cour de cassation va non seulement confirmer le jugement de la cour d’appel, mais les magistrats vont ajouter que le comportement du père défunt était de bon aloi. Selon la Haute juridiction, le versement des primes était utile car il s’agissait de se constituer « un placement à long terme ». « La cour d'appel a pu déduire qu'à la date de leur versement, les primes ne présentaient pas un caractère manifestement exagéré et ne devaient pas être réintégrées à l'actif de la succession »,conclut la Cour. D’où le rejet du pourvoi.


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