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Aidants 16 octobre 2017

L’aidant(e) : un(e) inconnu(e) plus fragile qu’il n’y paraît


J’aide, tu aides, elle aide, nous aidons… un proche. Qu’elle ou il soit malade, handicapé ou dépendant. Nous sommes ou serons tous (ou presque !) concernés un jour ; certains le sont sans même parfois s’en rendre compte tellement cela leur parait naturel.Or, être aidant, ce n’est pas anodin. Cela peut avoir des impacts importants, trop souvent méconnus et sous estimés, sur la vie personnelle, la vie professionnelle, les revenus, la santé… Insuffisamment préparés, les aidants peuvent subir des conséquences insoupçonnées pouvant être graves, allant jusqu’à… l’augmentation de la mortalité, chiffres à l’appui.


Les aidants en quelques chiffres


Un rôle méconnu mais un statut (enfin !) reconnu par la loi : c’est déjà ça !

L’aidant familial et, plus généralement, le proche aidant sont reconnus par la loi dans le code de l’action sociale et des familles : l’article L.113-1-3. précise qu’est considéré comme proche aidant d’une personne âgée son conjoint, le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité ou son concubin, un parent ou un allié, définis comme aidants familiaux, ou une personne résidant avec elle ou entretenant avec elle des liens étroits et stables, qui lui vient en aide, de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne (la toilette, l’habillage, l’alimentation,  la continence, le déplacement, les transferts).

Cette aide peut prendre différentes formes : soins d’hygiène et de confort, accompagnement à la vie sociale, assistance pour les démarches administratives, vigilance, soutien psychologique, participation aux activités domestiques, éventuellement coordination d’autres intervenants…

 

L’aidant est d’abord une aidante, en majorité. Une femme qui, souvent, travaille : les proches aidants sont plus de la moitié à exercer une activité professionnelle. Entre 40 et 64 ans, ils sont près de 70% à devoir concilier vie professionnelle, vie personnelle et aide d’un proche. 

 


Un engagement « naturel » mais qui présente de nombreux risques

Si la prise en charge du rôle d’aidant apparaît souvent comme une évidence pour une écrasante majorité de personnes, ce rôle s’installe souvent dans la durée ; en moyenne 4,4 ans avec un fort engagement au quotidien.

Cette nécessaire disponibilité a bien sûr des impacts importants sur la vie personnelle et sociale des aidants : moins de temps à consacrer à ses enfants, son conjoint, ses amis, allongement des temps de trajet…. Mais également sur leur vie professionnelle (refus de mobilité géographique ou de promotion, réduction du temps de travail voire arrêt de l’activité professionnelle…), leur santé physique et morale (fatigue, stress, épuisement…), leur niveau de vie (baisse des revenus, coût du reste à charge de l’aidé(e), coût induits tels que frais de déplacement…)  et, au final, sur leur qualité de vie.

Dans près d’un cas sur deux, l’aidant déclare une maladie chronique et se trouve confronté à un risque de mortalité de 60% dans les 3 ans qui suivent le début de la maladie de leur proche. Plus grave encore, un tiers des aidants meurent avant la personne qu’elles aident âgée de 60 ans ou plus, usés psychiquement et physiquement.

 


La solitude des aidants

Si aidants et aidés partagent souvent une communauté de détresse, les premiers n’y sont que très rarement préparés. L’aidant est souvent le seul à s’occuper de son proche lui prodiguant dans près de ¾ des cas des soins quotidiens, exercices parfois compliqués. Être aidant, c’est être à la fois infirmier, psychologue, personnel de ménage, auxiliaire de vie…

Souvent, on oublie que l’accompagnement et la prise en charge d’une personne âgée ou handicapée ne s’improvise pas. Cela nécessite d’acquérir des compétences indispensables permettant un accompagnement de qualité : une meilleure connaissance du vieillissement, l’acquisition de « savoir-faire » (que suis-je habilité à faire ? comment le faire ?) et de « savoir-être » (comment me comporter face à un père ou une mère en situation de dépendance ?), la prise en compte de l’évolution des besoins en fonction de l’âge…

Couplés à des dispositifs de soutien psychologique, l’acquisition de ces compétences permettrait d’améliorer la qualité de vie des aidés mais aussi et surtout des proches aidants.

 

Concrètement, des dispositifs d’aide existent. Malheureusement, insuffisamment informée et trop souvent démunie, la majorité des aidants ne sait pas où s’adresser pour en bénéficier : comment bénéficier de l’APA (allocation personnalisée d’autonomie) ? Qui connait la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ? Comment organiser les aides au domicile d’une personne âgée ?... Autant de questions auxquelles les proches aidants n’ont que trop rarement de réponse.

 


La loi évolue mais…peut mieux faire !

En instituant le « droit au répit », permettant aux proches aidants des personnes âgées en perte d’autonomie de se reposer ou de dégager du temps, la loi d’adaptation de la société au vieillissement permet aux proches aidants de personnes bénéficiaires de l’APA assurant une présence ou une aide indispensable à la vie à domicile de leur proche  et qui ne peuvent être remplacés pour assurer cette aide par une personne de l’entourage de financer dans la limite de 500 € par an l’accueil de la personne aidée dans un accueil de jour ou de nuit, un hébergement temporaire en établissement ou en accueil familial voire un relais à domicile.

Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2017, le congé de proche aidant  permet aux salariés du privé de suspendre ou réduire leur activité professionnelle pour accompagner un proche qui souffre d’une perte d’autonomie importante. Sa durée maximale est de 3 mois, renouvelable dans la limite d’un an sur l’ensemble de la carrière professionnelle. Le maintien dans l’emploi est garanti.

Ce congé peut être fractionné (durée minimale de chaque période de congé fixée à une journée). Malheureusement ces dispositifs sont par nature limités et ne vont pas assez loin : alors que le congé de proche aidant n’est pas rémunéré, pourquoi ne pas étendre aux proches aidants de personnes âgées  la possibilité qu’offre le congé de présence parentale permettant aux parents d’enfant gravement malade, accidenté ou handicapé de bénéficier d’un crédit-jour de 310 jours tout en bénéficiant d’une allocation compensant la perte de salaire?

 


Un enjeu de société

Ces dispositifs ont bien sûr le mérite d’exister ; mais ils sont insuffisants ! Si l’Etat devait rémunérer les aidants, le coût dépasserait, d’après Serge Guérin, sociologue, les 164 milliards d’euros ce qui serait bien évidemment insupportable pour un budget national d’un pays comme la France. Aussi, compte tenu du poids de la charge dont ils allègent la collectivité , les aidants doivent être reconnus et soutenus y compris dans leur activité professionnelle.

Compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie et du vieillissement de la population entrainant une augmentation des maladies chroniques, le besoin d’aide deviendra de plus en plus prégnant. Le recul progressif de l’âge de départ en retraite va nécessairement entrainer un nombre croissant de personnes en activité à assumer le rôle de proche aidant.

Reconnaître l’importance des proches aidants au sein de la société et leur permettre de mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle constituent de véritables enjeux pour nos sociétés.      

 


Article rédigé par Hervé Raquin

@RaquinH


 

 

 

 

 

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