Seule la moitié de la valeur d’un don doit être rapportée à la succession, y compris dans le cas de conjoints donateurs ayant adopté le régime de la communauté universelle avec attribution intégrale au dernier vivant, a récemment jugé la Cour de cassation.


 

Sauf clause particulière, seule la moitié de la valeur d’un bien donné à un enfant doit être rapportée à l’actif successoral au décès du parent survivant, même si les donateurs étaient mariés sous le régime de la communauté universelle avec attribution intégrale au dernier vivant. Ce jugement, qui ne coule pas forcément de source, a été prononcé par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 17 avril 2019.

Àl’origine du litige, on trouve un couple, d’abord marié sous le régime de la communauté des biens réduite aux acquêts, qui avait donné la nue-propriété (les murs) d’un immeuble acquis en commun à l’un de leurs deux enfants (la fille en l’occurrence), se réservant l’usufruit (la jouissance) du bien. Les époux décident ensuite de changer de régime matrimonial et adoptent la communauté universelle avec attribution intégrale au conjoint survivant. L’épouse décède, puis c’est au tour de son mari quelques années plus tard.


Divergence de point de vue

La fille qui a reçu l’immeuble en donation et son frère ne sont pas d’accord sur la valeur du bien donné à rapporter à la succession de leur père défunt. Pour la première, l’immeuble ayant été acquis en commun par ses parents, la moitié de sa valeur doit être prise en compte puisqu’il s’agit du décès de l’un des deux. Le fils argue, lui, que, compte tenu du régime de la communauté universelle avec attribution intégrale au dernier vivant de ses parents, la totalité de la valeur du bien donné à sa sœur doit être comptabilisée. Cette divergence de point de vue engendre une répartition des droits successoraux différents pour les membres de la fratrie.

Dans un arrêt daté du 12 mars 2018, la cour d’appel de Pau se range à l’avis du fils. L’institution évoque les articles 1438 et 1439 du Codecivil stipulant qu’en présence d’une donation conjointe de biens communs, comme un don réalisé par un seul époux avec le consentement de l’autre à un enfant issu du mariage, la charge de la donation incombe définitivement à la communauté.

Question en suspend

La Cour de cassation rejette l’arrêt de la cour d’appel. La plus haute juridiction française rappelle que, selon l’article 850 du Codecivil, le rapport des dons et legs ne se fait qu’à la succession du donateur. Du coup, « en l’absence de clause particulière dans l’acte, seule la moitié de la valeur du bien objet de la donation était rapportable à la succession » du père, estime la Cour. La Haute juridiction précise même qu’en conséquence, les frais afférents à la donation ne doivent pas être pris en charge dans leur intégralité par la fille donataire.

Une question se pose toutefois : si la valeur de la donation est rapportée pour moitié au décès du père, n’aurait-elle pas dû être également rapportée pour moitié à la succession de la mère lorsque celle-ci est décédée ? La Cour de cassation ne répond pas à cette interrogation de bon sens.


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