Le projet de loi de finances pour 2020 a été adopté par l’Assemblée nationale le 19 décembre 2020. L’une des mesures adoptées introduit pour une durée de trois ans un nouveau dispositif expérimental de lutte contre la fraude fiscale ayant pour but de détecter les comportements fiscaux frauduleux les plus graves. Grâce à ce dispositif, l’administration fiscale et l‘administration des douanes et droits indirects pourront collecter les contenus librement accessibles publiés sur Internet par les utilisateurs de plateformes en ligne telles que les plateformes de mise en relation et d’échange de biens et services (Le Bon Coin, EBay, etc.) ainsi que les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, Twitter, etc.).


Le texte assortit ce système de collecte et d’exploitation des données de plusieurs garanties afin de le concilier avec le droit au respect de la vie privée. Premièrement, les données collectées et exploitées devront être librement accessibles (ce qui exclut les contenus accessibles seulement après saisie d'un mot de passe ou après inscription sur le site en cause) mais devront également être délibérément divulguées par les personnes en cause. Par ailleurs, les données devront être collectées et exploitées uniquement pour rechercher certains manquements et certaines infractions visées par le texte, notamment les manquements et infractions visant les activités économiques occultes, les fraudes douanières, la fausse domiciliation à l’étranger ou une inadéquation entre les revenus déclarés avec le train de vie.

 

Lors de son contrôle du projet de la loi de finances de 2020, le Conseil constitutionnel a rappelé que le pouvoir règlementaire et les juges devront veiller à ce que les algorithmes utilisés ne permettent de collecter et de conserver que les données strictement nécessaires à ces finalités. Il a par ailleurs précisé que les données sensibles, celles qui révèlent la prétendue origine raciale ou origine ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou l'appartenance syndicale d'une personne, les données génétiques et biométriques et celles concernant la santé et la vie ou l'orientation sexuelles, ne pourront faire l'objet d'aucune exploitation à des fins de recherche de manquements ou d'infractions.

 

Les données collectées pourront être conservées pour une durée pouvant aller jusqu’à un an lorsqu’elles sont de nature à conduire à la constatation des manquements et infractions mentionnés dans le texte. Le délai de conservation sera réduit à 5 jours pour les données sensibles ou sans lien avec les infractions et à 30 jours pour les autres.

 

A noter que le texte met en place un droit d’accès aux données collectées mais refuse tout droit d’opposition à la collecte.


Sources : Article 154 de la Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 et Conseil Constitutionnel, Décision n° 2019-796 DC du 27 décembre 2019