La victime d’un dommage imputé à un produit défectueux peut agir contre le producteur sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle, si elle établit que son dommage résulte d'une faute commise par le producteur, telle qu'un maintien en circulation du produit dont il connaît le défaut ou encore un manquement à son devoir de vigilance quant aux risques présentés par le produit.
Dans cette affaire, une patiente s’est vu prescrire du Mediator de 2007 à 2009. Se plaignant de lésions cardiaques, elle a saisi l’ONIAM (l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales) qui a reconnu que son dommage était imputable à ce médicament. Les laboratoires producteurs lui ont proposé des offres d’indemnisation qu’elle a refusées.
En 2020, elle a assigné le producteur sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux. Le producteur lui indiquant que son action était prescrite, elle a fondé son action sur la responsabilité extracontractuelle.
La cour d’appel a rejeté sa demande en considérant d’une part que son action était prescrite ; d’autre part, elle a retenu que la faute reprochée au laboratoire, prise d’ un manquement au devoir de vigilance et de surveillance de commercialisation d'un produit dont il connaissait les risques ou de l'absence de retrait du produit du marché français, n'était pas distincte du défaut de sécurité du produit, de sorte que la responsabilité extracontractuelle ne pouvait se substituer au régime de la responsabilité du fait des produits défectueux.
Saisi d’un pourvoi en cassation formé par la victime, la haute juridiction ne suit pas le raisonnement de la cour d’appel.
Elle rappelle que l’article 1245-17 du Code civil issu d’une directive européenne instaure une responsabilité de plein droit du producteur au titre du dommage causé par un défaut de son produit. Elle fait également valoir que les dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux ne privent pas la victime d’une action sur le fondement du droit de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle. Le producteur reste responsable des conséquences de sa faute et de celle des personnes dont il répond.
La Cour de cassation pour rendre sa décision s’appuie également sur un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes qui retient que le régime mis en place par la directive européenne n’exclut pas l’application d’autres régimes de responsabilité reposant sur des fondements différents.
Elle juge donc que la victime d’un dommage peut agir en responsabilité contre le producteur sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle si elle établit que son dommage résulte d’une faute commise par le producteur, telle qu'un maintien en circulation du produit dont il connaît le défaut ou encore un manquement à son devoir de vigilance quant aux risques présentés par le produit.
Cass. 2e civ., 15 nov. 2023, n° 22-21.179
Cass. 1re civ., 15 nov. 2023, n° 22-21.174
Cass. 1re civ., 15 nov. 2023, n° 22-21.178
Cass. 1re civ., 15 nov. 2023, n° 20-21.180
CJCE, 25 avril 2002, Gonsalès-Sanchez, aff. C-183/00
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